L’historien espagnol Ramón Menéndez Pidal (La Coruña 1869-Madrid 1968), avec scrupulosité et rigueur, a donné une liste toponymique détaillée dans « Toponymia préromanica hispanique » (1968), avec une analyse de « multitude de noms toponymiques de type basque » dans l’Alto Aragon et dans la partie haute de Sobrarbe, Ribagorza et PaIlars. Menéndez Pidal a établi que pour ces régions pyrénéennes « à l’époque primitive romaine une romanisation faible ou à moitié, ce qui a provoqué une situation bilingue stationnaire dans laquelle ont vécu des siècles des gens bascongades avec des gens romaniés, d’où la conservation abondante des toponymes basques ».
On les trouve dans les zones pyrénées de Huesca et de Lérida, « où l’on documente une diptongation de ou et de noms où l’adjectif gorri d’une part, l’adjectif berri d’autre part et quelques suffixes – toi et -oi, abondanciaux ou tendances. L’achèvement -otz, -otze = froid était également très pris en compte. Le linguiste allemand Gerhard Rohlfs dans « Le suffixe préroman -ue, -uy dans la toponymie aragonaise et catalane », affirme que sa densité maximale l’atteint au nord de Huesca et surtout entre les anciennes villes baskones de Jaca et de Pampelune, c’est-à-dire « dans un domaine où on peut remarquer une extraordinaire densité de survie basque » (Archive de philologie aragonaise, IV, 1952).
Alfonso Irigoyen dans « Questions de toponymie basque cirmpyrénéenne » (1986), a fait un travail approfondi en utilisant essentiellement les répertoires élaborés par Ariño (pour l’époque actuelle) et Agustín Ubieto (pour l’époque médiévale), où il conclut que « l’affirmation selon laquelle, de part et d’autre des Pyrénées, dans une zone beaucoup plus étendue que la zone basque actuelle, il y avait d’autres planches protovasques ou basques dans les temps anciens.”
Un cas particulier est celui du nom lui-même « Aragon » ou « Aragoi » qui est également en euskera : « Valle en el alto » ou plus probablement d’Aragoa, « de la haute vallée » face aux gens de la plaine, ce qui nous ramène au début du repeuplement que nous avons vu, où « oa » est simplement le locatif (Nafarroa, Zuberoa, Gipuzkoa etc. ).
L’anthropologue, linguiste, historien et ethnologue madrilène Julio Caro Baroja (1914-1995) commentait « Sur la toponymie des Pyrénées aragonaises » : « C’est en réalité un nom géographique qui délimite, par le Sud, un territoire. Suprarbi ou Superarvi était ce qui restait au-dessus de la scie Arbe. Sur le territoire de Sobrarbe, comme dans celui d’Aragon, un dernier réduit des dialectes ibériques a été signalé, qui arriverait à Ribagorza et Pallars, et qui serait représenté par une série de noms de type basque, qui ont subi les effets d’une influence tardive ».
(Tour d’Abizanda commandée de construire par Sancho III le Major de Nabarra au XIe siècle)
Le philologue Joan Corominas (Barcelone 1905-1997) concrétisait même le pourcentage de toponymie euskara :
Comarque Aragon (Jaca) : 67 %
Comarque de la rivière Gallego : 50 %
Comarque Sobrarbe : 30 %
Comarque du bas-Ribagorce : 15 %
(En ce qui concerne les vallées voisines de Catalogne et d’Andorre, on peut lire : https://lehoinabarra.blogspot.com/…/hasta-cuando-se…
Exemples de toponymes en euskera de la vallée Nabarro du Ronkal à la vallée d’Aran à Lleida, y compris Aragon, nous étaient donnés par le studieux ronkalés Bernardo Estornes Lasa :
Benabarre, Zoriza, Lujiarre, Lascuarre, Luparre, Bizberri, Astu, Arbe, Axpe, Arbe, Cenarbe, Javierregay, Achar, Lizarra, Gistain, Eunate, Artaso, Artasona, Barosa, Ayerbe, Bisauri, Loarre, Aisa, Bisos, Acon, Larres, Biescas, Escarrilla, Lanuza, Basaran, Bergua, Ara, Ecuain, Yaga, Arazas, Suelza, Barrosa, Yna, A ren, Barruera, Escuñau, Esera, Espua, Isona, Quarte, Gurea, Biscarrues, Ardisa, Erla, Bolea, Arascués, Esquedas, Aniés, Sabayés, Belarra, Hirbike, Mascun, Guarga, Basa, Estron, Escaldes, Engolasters, Esquella, Aranza, Esabol, Escardars, Estana, Nabas, Quart, Ana, Gurri, Maya, Bascara, Estiche, Jubierre, Ballobar, Escarpe, Algerri,