À toutes et tous celles et ceux qui disent avec affection que lorsque je parle occitan cela leur rappelle les mots de patois de leurs grands-parents :
la langue que parlait votre mamet, ou votre papet, était la noble langue d’òc qui couvre 34 départements du Sud de la France.
Celle qui chanta l’amour courtois des troubadours entre le IX ème et le XIII ème siècle dans la civilisation d’òc, qui rayonna dans toutes les cours d’Europe puis fut écrasée par la croisade contre les albigeois.
Permettez moi de vous expliquer que ces mots viennent de la langue des comtes de Toulouse, d’Aquitaine, de Navarre et de Provençe, celle du roi d’Aragon, de l’Académie des jeux Floraux (dont les statuts inspirèrent ceux de l’Académie Française quelques siècles plus tard).
Langue officielle jusqu’à ce que François Premier l’interdise dans les actes officiels, comme toutes les autres langues des terres rattachées à sa couronne, par peur de révoltes contre son pouvoir central.
Les États de langue d’oc ne purent plus l’employer et les élites apprirent donc la langue Françoise pour plaire au monarque.
Malgré ce, la langue d’òc resta majoritairement employée par les populations, au Sud de la Loire, du Limousin à la Côte d’Azur, sans faillir. Les papes d’Avignon s’en trouvaient fort aise, car sa proximité avec leur italien ou bas latin leur rendait la communication facile avec les provençaux de langue d’òc. Du grand schisme jusque sous la Révolution, en passant par là retirada des voisins espagnols, la langue d’òc témoigne de l’histoire de nos régions. Joan Petit l’utilisa pour mener la révolte des Croquants en Rouergue, Frédéric Mistral obtint un prix Nobel pour son entreprise de collectage lexicographique Lo Trésor du Félibrige qui classe le riche vocabulaire des variantes régionales de langue d’òc.
Enfin puisque nous sommes le 11 novembre, permettez- moi encore, d’attirer votre attention sur le fait que durant la 1 ère guerre mondiale, la langue d’òc fut encore et toujours parlée et écrite par les soldats du midi.
Utilisée dans les lettres des poilus pour témoigner des horreurs de la guerre auprès de leurs familles en passant sous les radars de la censure militaire. (Sources : les archives du Cirdoc et la très instructive pièce d’André Neyton, Le soldat O. à ce sujet).
Langue donc.
À la fois populaire et littéraire malgré son interdiction dans l’école de Jules Ferry, qui mit le mot patois en avant pour faire oublier les noms de leurs langues aux enfants de France en les punissant pour mieux les unir autour d’une langue commune unique, n’en tolérant aucune autre.
Ainsi naquit la diglossie et les parents s’autocensurèrent afin que leurs enfants ne souffrent pas.
« Interdit de cracher par terre et de parler patois » fut écrit dans toutes les salles de classes !
Si vous recherchez la définition de ce mot dans les dictionnaires des années 60/80, vous en trouverez une définition toute autre que le souvenir affectueux que vous inspire votre grand-mère…
Je ne doute point que vous apprécierez : « Patois : langue d’un peuple sans culture, ou dont le niveau de culture est inferieur à celui qui l’entoure. »
Un brin colonialiste et méprisant, vous en conviendrez.
Car je ne connais pas de « peuple sans culture », même ceux qui n’ont pas eu le niveau d’étude que certains associent à l’émancipation. Et je me hasarderai encore moins à lister de hiérarchie parmi les peuples…l’histoire nous a bien démontré où cela peut mener en terme de barbarie.
Malgré ces tentatives de domination et d’éradication,
La langue d’òc poursuit néanmoins sa voie de langue minorisée mais résistante et son enseignement fut à nouveau autorisé par la loi Deixone, dans les années 1950, grâce au militantisme de quelques érudits, de passionnés, des écrivains qui la prisaient et à l’ouverture d’esprit de quelques ministres éclairés.
Ainsi naquit la diglossie qui de nos jours fait que la langue d’òc est en danger de disparition, selon l’Unesco, car manquant de moyens publics pour son enseignement et sa socialisation. La réduction depuis les années 1995 de 20 à 3 ou 4 postes de professeurs par an depuis vingt ans n’aide pas à sa transmission. Les associations seules ne peuvent palier à cet état d’abandon.
D’autres états européens ont fait d’autres choix vis à vis de la diversité linguistique sur leurs territoires. Leur démocratie n’en est pas plus mal menée que la nôtre…
La république doit traiter tous ces citoyens comme égaux, tous payent des impôts.
Mais aujourd’hui encore, tous n’ont pas le même pouvoir de parole ni d’accès à la programmation culturelle.
Aujourd’hui encore 70% du budget national de la culture est dépensé à Paris et dans la région parisienne. Est-ce là que résident les 70% de la population du pays ?
Alors, oui, fai pas caud pour les amoureux de la diversité.
Veuillez excuser cette longue envolée matinale, mais …
Coma uèi fa un freg que pela, demòri a l’ostal de matin e ai lo temps d’escriure. Bona jornada.
Amistats
LA LENGA D’ÒC ![]()
À toutes et tous celles et ceux qui disent avec affection que lorsque je parle occitan cela leur rappelle les mots de patois de leurs grands-parents :
la langue que parlait votre mamet, ou votre papet, était la noble langue d’òc qui couvre 34 départements du Sud de la France.
Celle qui chanta l’amour courtois des troubadours entre le IX ème et le XIII ème siècle dans la civilisation d’òc, qui rayonna dans toutes les cours d’Europe puis fut écrasée par la croisade contre les albigeois.
Permettez moi de vous expliquer que ces mots viennent de la langue des comtes de Toulouse, d’Aquitaine, de Navarre et de Provençe, celle du roi d’Aragon, de l’Académie des jeux Floraux (dont les statuts inspirèrent ceux de l’Académie Française quelques siècles plus tard).
Langue officielle jusqu’à ce que François Premier l’interdise dans les actes officiels, comme toutes les autres langues des terres rattachées à sa couronne, par peur de révoltes contre son pouvoir central.
Les États de langue d’oc ne purent plus l’employer et les élites apprirent donc la langue Françoise pour plaire au monarque.
Malgré ce, la langue d’òc resta majoritairement employée par les populations, au Sud de la Loire, du Limousin à la Côte d’Azur, sans faillir. Les papes d’Avignon s’en trouvaient fort aise, car sa proximité avec leur italien ou bas latin leur rendait la communication facile avec les provençaux de langue d’òc. Du grand schisme jusque sous la Révolution, en passant par là retirada des voisins espagnols, la langue d’òc témoigne de l’histoire de nos régions. Joan Petit l’utilisa pour mener la révolte des Croquants en Rouergue, Frédéric Mistral obtint un prix Nobel pour son entreprise de collectage lexicographique Lo Trésor du Félibrige qui classe le riche vocabulaire des variantes régionales de langue d’òc.
Enfin puisque nous sommes le 11 novembre, permettez- moi encore, d’attirer votre attention sur le fait que durant la 1 ère guerre mondiale, la langue d’òc fut encore et toujours parlée et écrite par les soldats du midi.
Utilisée dans les lettres des poilus pour témoigner des horreurs de la guerre auprès de leurs familles en passant sous les radars de la censure militaire. (Sources : les archives du Cirdoc et la très instructive pièce d’André Neyton, Le soldat O. à ce sujet).
Langue donc.
À la fois populaire et littéraire malgré son interdiction dans l’école de Jules Ferry, qui mit le mot patois en avant pour faire oublier les noms de leurs langues aux enfants de France en les punissant pour mieux les unir autour d’une langue commune unique, n’en tolérant aucune autre.
Ainsi naquit la diglossie et les parents s’autocensurèrent afin que leurs enfants ne souffrent pas.
« Interdit de cracher par terre et de parler patois » fut écrit dans toutes les salles de classes !
Si vous recherchez la définition de ce mot dans les dictionnaires des années 60/80, vous en trouverez une définition toute autre que le souvenir affectueux que vous inspire votre grand-mère…
Je ne doute point que vous apprécierez : « Patois : langue d’un peuple sans culture, ou dont le niveau de culture est inferieur à celui qui l’entoure. »
Un brin colonialiste et méprisant, vous en conviendrez.
Car je ne connais pas de « peuple sans culture », même ceux qui n’ont pas eu le niveau d’étude que certains associent à l’émancipation. Et je me hasarderai encore moins à lister de hiérarchie parmi les peuples…l’histoire nous a bien démontré où cela peut mener en terme de barbarie.
Malgré ces tentatives de domination et d’éradication,
La langue d’òc poursuit néanmoins sa voie de langue minorisée mais résistante et son enseignement fut à nouveau autorisé par la loi Deixone, dans les années 1950, grâce au militantisme de quelques érudits, de passionnés, des écrivains qui la prisaient et à l’ouverture d’esprit de quelques ministres éclairés.
Ainsi naquit la diglossie qui de nos jours fait que la langue d’òc est en danger de disparition, selon l’Unesco, car manquant de moyens publics pour son enseignement et sa socialisation. La réduction depuis les années 1995 de 20 à 3 ou 4 postes de professeurs par an depuis vingt ans n’aide pas à sa transmission. Les associations seules ne peuvent palier à cet état d’abandon.
D’autres états européens ont fait d’autres choix vis à vis de la diversité linguistique sur leurs territoires. Leur démocratie n’en est pas plus mal menée que la nôtre…
La république doit traiter tous ces citoyens comme égaux, tous payent des impôts.
Mais aujourd’hui encore, tous n’ont pas le même pouvoir de parole ni d’accès à la programmation culturelle.
Aujourd’hui encore 70% du budget national de la culture est dépensé à Paris et dans la région parisienne. Est-ce là que résident les 70% de la population du pays ?
Alors, oui, fai pas caud pour les amoureux de la diversité.
Veuillez excuser cette longue envolée matinale, mais …
Coma uèi fa un freg que pela, demòri a l’ostal de matin e ai lo temps d’escriure. Bona jornada.
Amistats
